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CHAPITRE 9 – LES REPRÉSENTATIONS À L’ÉCRAN

Les “œuvres” audio-visuelles

Documentaire et reportage

 

Définitions : Entre œuvre artistique et enquête journalistique, le documentaire se distingue de la fiction puisque les sujets traités sont réels et que le but principal reste celui d’informer à propos de cette réalité. Contrairement au reportage journalistique, le documentaire utilise un langage artistique qui fait aussi appel aux émotions du spectateur, afin de le pousser à la réflexion. A l’inverse, le reportage est une enquête journalistique fondée sur le principe d’objectivité, même si l’auteur de l’enquête peut avoir une posture militante et engagée. Dans le reportage tout aspect de fiction est abandonné pour laisser la place aux éléments factuels.

 

Exemples :

 

– Le documentaire Druga strana svega (« L’envers d’une histoire », 2017) de la réalisatrice serbe Mila Turajlić revient, par exemple, sur l’histoire serbe des dernières 70 années à travers la perspective de Srbijanka Turajlić, mère de la réalisatrice et militante pour la paix. La réalisatrice fait dialoguer son histoire familiale avec l’histoire de son pays, abordant la question de l’engagement politique des anciennes générations face à la désillusion des jeunes serbes d’aujourd’hui.

 

– Un autre documentariste, le kosovar Samir Karahoda, aborde la question de l’émigration d’une partie de la jeunesse du Kosovo à travers son œuvre Në Mes (« In Between », 2019). A travers ce documentaire, Karahoda montre un aspect crucial de l’actualité de son pays, notamment l’absence de perspective économique pour une grande partie de sa jeunesse et l’émiettement de la famille, unité sociale très importante dans la société kosovare.

 

– Dans le contexte balkanique nombre de reportages ont été consacrés, par exemple, à la question de la corruption et du crime organisé. C’est le cas d’un reportage de la journaliste monténégrine Olivera Lakić, auteure d’une enquête sur le crime organisé suite à laquelle elle est devenue la cible d’une attaque à l’arme à feu.

 

Les films et le cinéma

 

La fiction et le cinéma peuvent aussi aborder les mêmes thématiques que les documentaires et les reportages journalistiques sans pour autant suivre les mêmes procédés. Les films peuvent raconter des histoires inventées tout en s’inspirant de la réalité. Le cinéma permet donc d’aborder, avec une grande liberté, des questions sociétales centrales, et pousser le spectateur à la réflexion.

 

Exemple : Dans son film Honeymoons (2009), le réalisateur serbe Goran Paskaljević met en scène l’histoire inventée de deux couples, l’un serbe, l’autre albanais, pour aborder le thème de l’émigration vers l’Europe, à travers un regard à la fois ironique et dramatique

 

 

La télévision : Le journal télévisé

Dans l’histoire des médias et de l’accès à l’information, l’apparition de la télévision a joué un rôle proche de celui des réseaux sociaux aujourd’hui, dans le sens où son utilisation a représenté une sorte de révolution dans la manière dont les populations consomment les informations. Ce média emblématique reste encore important dans nos sociétés et doit nous interroger sur la manière dont l’outil audiovisuel est utilisé pour communiquer des informations.

 

Définition : Le journal télévisé est une émission d’information de plusieurs dizaines de minutes diffusée à la télévision et animée par un ou plusieurs présentateurs. Il peut proposer des reportages sur des sujets internationaux, nationaux ou locaux, ou des chroniques intermittentes comme la météo.

 

L’objectif principal du journal télévisé est d’apporter des informations de qualité recueillies par les journalistes ou les correspondants travaillant pour la chaîne, sur l’actualité ou sur des sujets de fond. Contrairement à la radio qui propose aussi des émissions “flash” sur l’actualité, le journal télévisé fait une place particulière à l’image, à la fois dans l’apparence et la gestuelle du présentateur mais aussi lors des reportages, des photographies ou des infographies diffusées à l’écran (code couleur, police utilisée dans l’écriture, type de décor pour le plateau etc.)

 

Exemple : La direction du JT de la chaine albanaise Zjarr TV, a décidé, en 2016, de faire présenter le bulletin d’informations par des présentatrices au buste nu sous une veste ouverte dissimulant à peine leur poitrine. Ce choix, fortement critiqué pour son caractère sexiste, représente un cas extrême mais illustre bien l’importance de la gestion de l’image et du visuel lors d’un journal télévisé.

 

Un support qui a ses limites

Bien que la télévision soit un média très populaire, les chaînes n’échappent pas à une certaine logique économique et parfois même à une l’influence politique (en particulier dans le cas des chaînes publiques) qui peut peser sur la qualité de l’information diffusée et limiter la représentation de la diversité des opinions et des mouvements d’opposition. . Dans la région des Balkans en particulier, es sujets de fond peuvent être remplacé par des sujets plus légers se calquant sur un modèle de “tabloïd” et de presse people.

 

Exemple : En mars 2019, les manifestants serbes du mouvement #1od5 miliona et d’autres représentants des partis d’opposition, ont protesté devant les bureaux de la radio-télévision serbe (RTS) pour critiquer cette non-représentation à la télévision.

 

Face à cette situation, plusieurs chaînes d’informations internationales ont investi dans la région, à la fois pour proposer une alternative aux spectateurs, mais aussi pour des raisons géopolitiques. Ainsi, dans les dernières années, la chaîne qatari “Al Jazeera” a inauguré sa rédaction locale à Sarajevo, alors que la chaîne Russia Today a commencé à diffuser des informations en langue locale sur la radio serbe Studio B.

 

Le journal télévisé, bien qu’il reste très populaire, est par ailleurs de plus en plus supplanté par les médias en ligne et les réseaux sociaux.

 

Les nouveaux écrans

Dans tous les pays du monde, le temps passé sur les écrans augmente régulièrement chaque année, notamment chez les jeunes. Si la télévision occupe une bonne partie de ce temps, c’est davantage l’accès aux réseaux sociaux qui fait augmenter ce temps d’écran. L’étude de “BusinessFibre.co.uk” en 2019 dresse par exemple la liste des pays qui passent le plus d’heures sur internet, rappelant que la moyenne mondiale du temps passé sur les écrans est de 6 heures et 42 minutes par jour (lien disponible dans la section “pour aller plus loin”).

 

Dans ce temps passé sur les réseaux sociaux, une grande partie est dédiée à la visualisation de vidéos, omniprésentes sur internet, et notamment grâce à l’application du “géant” de la vidéo : YouTube.

 

Définition : YouTube est une plateforme d’hébergement de vidéos et un média social sur lequel les utilisateurs peuvent envoyer, regarder, commenter, évaluer et partager des vidéos en streaming. Créé en février 2005 par Steve Chen, Chad Hurley et Jawed Karim, trois anciens employés de PayPal, et racheté par Google en octobre 2006 pour 1,65 milliard de dollars, il est un des sites les plus consultés du monde (En 2020, chaque mois, YouTube compte plus de 2 milliards d’utilisateurs connectés).

 

Il est alors intéressant de constater que cette plateforme reprend certains codes audiovisuels de la télévision. Par exemple on parle de “chaîne YouTube”, et les “Youtubeurs” doivent posséder les mêmes compétences que les présentateurs télé : une bonne expression orale, une apparence qui donne envie de regarder la vidéo, allant même jusqu’à reproduire des plateaux d’émission de télévision.

 

Exemple : Les Youtubers les plus suivis dans différents pays :

Bosnie Herzégovine : https://www.youtube.com/user/Seherzad

Serbie : https://www.youtube.com/user/SerbianGamesBL2

Monténégro : https://www.youtube.com/user/BalkanGamesHD

 

Conscientes de l’attrait de ce format pour les jeunes générations, certaines chaînes de télévision investissent ce média en re-diffusant des émissions ou en proposant de regarder directement ces chaînes en direct sur YouTube (comme la chaîne RTS Sajt – Zvanični kanal en Serbie, qui y diffuse par exemple la série “Moja generacija Z” – “Ma Génération Z”).

 

Le succès de Youtube par rapport à la télévision s’explique aussi par la richesse du contenu qu’il propose. Puisque n’importe quel internaute peut produire ou poster une vidéo, les goûts et les opinions de chacun sont beaucoup mieux représentées qu’à la télévision. C’est donc aussi un outil dont le citoyen peut s’emparer pour s’exprimer sur ses sujets d’intérêt, vulgariser des savoirs, faire entendre ses idées, alerter sur un sujet ou communiquer des informations importantes, comme lorsque certains manifestants filment leur déplacement en direct lors d’une manifestation.

 

En se plaçant comme un pilier central à la diffusion et production audiovisuelle, YouTube et les médias sociaux proposant de la vidéo, jouissent d’une position hégémonique dans notre rapport à l’information. Cela pose alors les questions centrales de liberté d’expression, de monopole et de responsabilité quant aux contenus diffusés, notamment les potentielles fausses informations, discours de haine et théorie du complot malheureusement très populaires sur cette plateforme consultée en grande partie par les jeunes.

CHAPITRE 8 – LUTTER CONTRE LES FAKE NEWS

LA NOTION D’INFOX : UN ÉLÉMENT CENTRAL DE L’EMI

Définition : Lorsque l’on parle d’infox, de fausses informations ou de “Fake News”, Il s’agit d’informations fabriquées, truquées ou déformées, diffusées volontairement par des individus, militants ou responsables politiques, dans le but de manipuler les citoyens et de les faire adhérer à leurs idées.

 

La diffusion de ces fausses informations peut avoir des conséquences néfastes sur la société : par exemple, lorsqu’il s’agit de viser ou d’accuser une minorité ou une communauté afin de susciter la peur et d’inciter à la haine envers elle. Aussi lorsque la fausse information est utilisée pour créer un sentiment d’insécurité dans un but électoral, la manipulation d’information se trouve être un instrument d’une très grande efficacité.

 

Exemple : Les manifestations contre la présence de migrants se sont ainsi multipliées à l’approche des élections législatives du 21 juin en Serbie. Le 2 mars 2020, 500 personnes environ s’étaient déjà réunies dans la ville de Subotica, frontalière avec la Hongrie tout au nord du pays, avant de dénoncer les « crimes » commis par les migrants sur le territoire serbe, alors même que selon les données de la police, les infractions commises par les réfugiés ne représentent que 0,06% des délits recensés dans le pays.

 

Certains faits divers et scandales comme celui du “Cambridge Analytica” aux Etats-unis (utilisation des données de millions d’utilisateurs qui seront ensuite la cible de Fake News) nous rappellent combien les informations manipulées ont un impact sur notre vie, de notre quotidien jusqu’aux élections présidentielles.

 

Exemple : En mars 2020 en Bosnie-Herzégovine, une femme de 51 ans qui rentrait d’un voyage en Italie et testée positive au coronavirus, a été victime d’un véritable lynchage sur les réseaux sociaux après la publication d’informations erronées par plusieurs médias. Ces derniers racontaient qu’elle avait assisté à un concert et pris les transports en commun. Certains commentaires sur Facebook, déclaraient que cette femme méritait d’être tuée parce qu’elle était infectée, qu’elle ne devait pas rentrer en Bosnie-Herzégovine.

 

Dès lors, en déformant, manipulant et falsifiant la réalité pour susciter de la haine et tenter de convaincre les citoyens avec de faux arguments ou des informations qui n’existent pas, les fausses informations interrogent la notion même de vérité et de citoyenneté dans les sociétés modernes. Parce qu’elles mobilisent la plupart du temps nos émotions, nos préjugés et confirment parfois nos opinions, les infox se diffusent facilement et trouvent un écho important sur les réseaux sociaux, renforçant leurs effets néfastes sur la qualité de l’information disponible.

 

A ce titre, l’information étant essentielle à notre vie et au coeur de toutes nos décisions et de notre rapport aux autres, il est primordial de préserver sa fiabilité, sa transparence et éviter autant que possible les manipulations dont elle peut faire l’objet. En plus d’être attentif à la qualité de l’information, adopter une posture critique à l’égard des contenus que l’on consulte ou reçoit permet de limiter le risque de manipulation ou d’influence extérieure et de se forger une opinion plus juste.

 

 

DEJOUER LES PIEGES DE LA DÉSINFORMATION

Pour lutter contre la désinformation plusieurs solutions sont envisagées :

  • Mieux contrôler la diffusion de l’information en ligne en responsabilisant les plateformes et les “géants du net” (Facebook, Google, Twitter etc.). Ces derniers ont tous pris des mesures dans ce sens en donnant la possibilité aux utilisateurs de signaler des fausses informations, en supprimant des comptes propageant des discours de haine et des Fake news ou en menant et relayant des campagnes de prévention. Par exemple en janvier 2020 Facebook a annoncé qu’il supprimera et interdira les vidéos de types “deepfake” sur sa plateforme.

 

A noter que laisser les GAFA réguler le contenu de ces plateformes peut être problématique au regard de la liberté d’expression et de la censure, dans un contexte où l’hégémonie de ces “Géant du net” interroge. A ce titre, il existe dans certains pays des organismes indépendants chargés de contrôler à la fois l’action des médias traditionnels mais aussi d’assurer le contrôle de l’information et la protection des utilisateurs sur ces plateformes en ligne.

 

  • Beaucoup d’États prennent aussi la mesure de l’urgence et de leur rôle dans le contrôle et la fiabilité des informations qui circulent à l’intérieur de leur pays en passant, la plupart du temps, par l’appareil législatif. Cependant il faut alors veiller à ce que les mesures prises pour limiter la désinformation et renforcer les moyens de contrôle ne limitent pas paradoxalement la liberté d’expression des médias et des citoyens, empêchant le travail du journaliste.
  • On peut aussi préparer la population à faire face de plus en plus souvent aux fausses informations, à la manipulation des images ou à la diffusion croissante et rapide des théories du complot. Ainsi les actions comme l’éducation critique aux médias et à l’information vont inciter la population à se protéger contre ces manipulations, par l’apport de connaissances et le développement de l’autonomie intellectuelle et de l’esprit critique.
  • Enfin la prise de conscience se fait également du côté des médias traditionnels. A ce titre un nouveau mode de traitement journalistique est apparu depuis peu dans certains pays mais aussi à une échelle plus internationale, afin de limiter les risques de désinformation : Le Fact Checking

 

 

LE FACT CHECKING

Origine et Définition

 

Face à la prolifération des fausses informations, images et vidéos truquées, notamment sur internet, les méthodes journalistiques de confrontation et de vérification des informations sont devenues indispensables à tel point que de nombreux médias ont développé depuis peu des services spécialisés dans la vérification des faits.

 

Souvent appelé fact-checking, ce nouveau mode de traitement journalistique consistait, à l’origine, à vérifier de manière systématique les affirmations de responsables politiques ou des éléments du débat public (chiffres, contenus législatifs, etc.). Mais avec la multiplication des infox et des dangers de la désinformation, le fact-checking consiste plutôt aujourd’hui à vérifier rapidement la véracité d’un fait, d’une image ou d’une rumeur et plus largement tous types d’informations véhiculées sur le Net.

 

Les limites du fact-checking

 

Cependant si le fact-checking est un outil utile pour la vérification des informations, il ne doit pas se transformer en dictat immuable de la vérité. En effet certaines questions ne peuvent pas être tranchées par un simple fact checking, comme des questions politiques, d’opinions ou de morale par exemple. Comme son nom l’indique il s’agit de rester “factuel” et de vérifier des faits précis.

 

De plus les éléments pour vérifier une information peuvent parfois manquer ou être dépendants d’autres organismes. Par exemple, calculer le nombre de personnes présentes dans une manifestation va obliger le média fact-checker à faire lui même confiance aux chiffres communiqués soit par les autorités, soit par les organisateurs de la manifestation, ce qui va très certainement amener à des disparités fortes.

 

Il faudra donc là aussi encourager la prudence et garder un esprit critique en sachant quand accorder sa confiance à un média fact-checker et quand une question mérite d’être traitée avec du recul.

CHAPITRE 4 – MÉDIAS ET CITOYENNETÉ

LA LIBERTÉ D’EXPRESSION ET LA LIBERTÉ DE LA PRESSE

 

  • La liberté d’expression est un droit, le droit d’exprimer librement ce que l’on pense.

 

Si la liberté d’expression doit permettre à chacun.e. d’être libre de penser et d’exprimer ses opinions, elle a aussi ses limites: il faut veiller à ne pas faire de diffamation, d’injure, d’appel à la haine envers un groupe à cause de sa religion, sa couleur de peau ou de sa sexualité, d’encouragement au terrorisme, au crime de guerre.

 

  • La liberté de la presse, qui reflète le droit à la liberté d’expression, garantit aux citoyens d’avoir toutes les informations nécessaires pour se forger une opinion librement.

 

Les journaux ont pour rôle d’éclairer les lecteurs et de susciter des débats d’idées entre les citoyens. Pour cela, les journalistes obéissent à des règles. Ils peuvent parler de tous les sujets, mais en faisant attention à vérifier l’information pour en garantir la qualité.

 

Dans certains pays, la liberté de la presse peut être mise à mal, et les journalistes peuvent être empêchés de couvrir certains événements ou de critiquer le pouvoir. Chaque année, l’ONG Reporters sans Frontières publie un classement sur la liberté de la presse dans le monde.

 

 

LA DÉONTOLOGIE DU JOURNALISME

  • Le journalisme est un domaine qui consiste à rechercher une information, la vérifier, la situer dans son contexte, la hiérarchiser, la mettre en forme, la commenter et publier une information de qualité ; il ne peut se confondre avec la communication.
  • L’exercice de la profession : La notion d’urgence dans la diffusion d’une information ou d’exclusivité ne doit pas l’emporter sur le sérieux de l’enquête et la vérification des sources. Pour travailler dans de bonnes conditions, le journaliste doit pouvoir accomplir tous les actes de sa profession (enquête, investigations, prise d’images et de sons, etc…) librement, avoir accès à toutes les sources d’information concernant les faits qui conditionnent la vie publique et voir la protection du secret de ses sources garantie.
  • La Déclaration des Droits et Devoirs des journalistes de Munich, rédigée en 1971 par l’ensemble des syndicats de journalistes au niveau européen, donne des orientations pour une pratique déontologique du journalisme. Selon cette déclaration, un journaliste digne de ce nom:
  • respecte la dignité des personnes et la présomption d’innocence ;
  • tient l’esprit critique, la véracité, l’exactitude, l’intégrité, l’équité, l’impartialité, pour les piliers de l’action journalistique ;
  • tient l’accusation sans preuve, l’intention de nuire, l’altération des documents, la déformation des faits, le détournement d’images, le mensonge, la manipulation, la censure et l’autocensure, la non vérification des faits, pour les plus graves dérives professionnelles ;
  • exerce la plus grande vigilance avant de diffuser des informations d’où qu’elles viennent ;
  • dispose d’un droit de suite, qui est aussi un devoir, sur les informations qu’il diffuse et fait en sorte de rectifier rapidement toute information diffusée qui se révèlerait inexacte ;
  • défend la liberté d’expression, d’opinion, de l’information, du commentaire et de la critique ;
  • proscrit tout moyen déloyal et vénal pour obtenir une information.
  • ne touche pas d’argent dans un service public, une institution ou une entreprise privée où sa qualité de journaliste, ses influences, ses relations seraient susceptibles d’être exploitées

CHAPITRE 3 – L’INFORMATION ET LES MÉDIAS

DÉFINITIONS

1/ Un média est avant tout un support matériel qui permet la diffusion massive d’informations comme la presse écrite, la radio, internet ou la télévision.

 

Multiplication et diversification de l’offre d’information

 

Après la Seconde Guerre Mondiale, nous assistons à une densification de l’information et une multiplication des supports médiatiques : les foyers s’équipent en télévisions, les chaînes de radio se multiplient et de nombreux magazines de presse voient le jour. On parle alors de médias “ de masse “. Dès lors, l’information disponible est devenue plus importante et variée qu’elle ne l’était auparavant, et le phénomène s’est accentué jusqu’à nos jours avec l’ère du numérique qui a fondamentalement changé les façons de s’informer.

 

Modification du rapport à l’information

 

A mesure que cette offre d’information se multiplie et se diversifie, c’est notre propre rapport à l’information qui s’en trouve modifié, notamment depuis l’apparition d’internet au début des années 90. Véritables contre-pouvoir démocratique, les médias deviennent alors indispensables à la vie des citoyens. En période électorale par exemple, mais aussi tout au long de l’année, les médias sont la principale source de diffusion des propositions, des débats et des programmes politiques des représentants et des responsables politiques.

 

En outre, cette évolution de l’offre médiatique et notamment le développement d’internet a permis la propagation plus importante d’idées et d’opinions qui étaient alors marginales – ou moins diluées dans l’opinion publique – comme les théories du complot ou les idéologies extrémistes, facilitant alors leur diffusion auprès du grand public.

 

Mais les médias renvoient aussi à une dimension structurelle et professionnelle moins visible, c’est-à-dire qu’ils représentent un système organisé économiquement (de financement, de rémunération des journalistes) et socialement (ce qui implique de savoir en quoi consiste le métier de journaliste, ses pratiques, ses usages, l’éducation au journalisme).

 

2/ Une information, dans le contexte de l’éducation critique aux médias, est un fait relaté, provenant de sources identifiées, vérifiées et recoupées. À cela peut s’ajouter une mise en perspective expliquant ou interprétant le fait en question dans une dimension sociale, culturelle et politique. De plus, une information doit remplir trois critères :

 

  1. Avoir un intérêt pour le public : Pour être considéré comme une information, au sens médiatique et social du terme, un fait doit avoir un intérêt public. Par exemple, s’il s’agit de la présence de n’importe quel citoyen à un match de football, cela ne constitue pas une information susceptible d’avoir une importance pour l’ensemble des autres citoyens.
  2. Être factuelle : une information doit concerner un fait, être factuelle. C’est-à-dire, pour poursuivre notre exemple, que le score du match ou la blessure d’un joueur sur le terrain constituent des informations à part entière car il s’agit de faits, d’actes et de résultats observables. Au contraire, les rumeurs à propos du transfert d’un joueur vers un autre club, ou les potentielles tensions qui pourraient exister au sein d’une équipe ne constituent pas encore des informations.
  3. Être vérifiée et vérifiable: pour confirmer son statut d’information, un fait doit être vérifié et vérifiable. En d’autres termes, il faut être attentif ici à la notion de preuve qui valide le fait.

 

COMMENT LES MÉDIAS COMMUNIQUENT L’INFORMATION

En presse écrite, il est possible de relater une information de trois manières, ce qui revient à utiliser des genres journalistiques différents :

 

  1. L’information expliquée : Le journaliste analyse les faits, il décrypte l’information et donne au lecteur des informations sur le “comment” et le “pourquoi” . Ce type d’écriture est utilisé pour l’analyse, l’enquête, le dossier et l’interview journalistique.
  2. L’information commentée : Il s’agit d’un type d’écriture plus libre dans lequel le journaliste interprète et tente de déchiffrer les faits en jouant sur l’humour, en donnant son avis ou en portant un jugement. Ce mode d’écriture est utilisé pour la tribune, le billet, l’éditorial, la caricature ou la critique.
  3. L’information rapportée : C’est un style journalistique très narratif dans lequel le journaliste expose et raconte les faits en détails. C’est ce mode d’écriture qui est utilisé pour la brève, la dépêche, les faits divers, le compte-rendu, le reportage ou le récit.

 

LE CIRCUIT DE L’INFORMATION

Le circuit de l’information suit différentes étapes :

  1. Le fait
  2. L’alerte ( un journaliste est informé par ses sources)
  3. La vérification (plusieurs journalistes sont mobilisés, ils interrogent les organisations, les personnes ou les institutions concernées en se déplaçant sur place).
  4. Une conférence de rédaction peut -être organisée par le média. Le rédacteur en chef réunit les chefs de service, on décide de déployer les journalistes sur le terrain et de traiter différents angles: les caractéristiques, les hypothèses, les précédents, les reportages, le récit de la journée…
  5. Lors de la rédaction, le journaliste écrit son article ou son commentaire, puis les éditeurs relisent et corrigent, légendent les photos…
  6. Quand l’information est recoupée, c’est le moment de la publication. Elle est publiée sous la forme d’un flash, d’une alerte ou d’une dépêche, selon l’importance de l’information.

A savoir: Avoir un scoop, c’est publier l’information en premier. Les autres médias pourront le reprendre mais en précisant d’où elle provient.

CHAPITRE 1 – QU’EST-CE QUE L’ÉDUCATION AUX MÉDIAS ?

ENJEUX DE L’ÉDUCATION AUX MÉDIAS ET À L’INFORMATION

D’une manière générale, l’éducation aux médias et à l’information tend à favoriser la connaissance et la compréhension des médias et de l’information, dans la perspective du débat citoyen et de la participation sociale.

 

L’EMI associe deux domaines distincts: la maîtrise de l’information met l’accent sur l’importance de l’accès à l’information, son évaluation et son utilisation éthique. L’ éducation aux médias met l’accent sur la capacité de comprendre les fonctions des médias, d’évaluer la manière dont ces fonctions sont exercées et de faire usage de ces médias de façon rationnelle pour s’exprimer.

 

Ce domaine, permet à ceux qui le transmettent:

  • De mettre en valeur le rôle et les fonctions des médias dans la société, et les conditions dans lesquelles les médias remplissent ces fonctions.
  • D’intégrer et de transmettre les outils d’une évaluation critique du contenu des médias
  • De créer, avec le public visé, des médias d’information de qualité.
  •  

Pour bien saisir la portée globale de l’EMI, il faut souligner qu’une société qui maîtrise les médias et l’information, et favorise le développement des médias libres, indépendants et pluralistes, tend à favoriser une participation pertinente des citoyens.

 

 

ENSEIGNER L’EMI : LES DIFFÉRENTES APPROCHES

Différentes approches pédagogiques sont à utiliser par l’enseignant d’EMI:

  • L’approche “problématique – recherche” qui consiste à identifier une problématique ; reconnaître les attitudes et les croyances sous-jacentes ; clarifier les faits et les principes liés à cette problématique ; organiser et analyser les pistes ; interpréter et résoudre la question ; prendre des mesures et reconsidérer les conséquences et les résultats de chaque phase. Cela permet à l’élève de développer son esprit critique. Cette approche peut être privilégiée pour l’analyse des fake news ou des théories du complot.
  • L’étude de cas, qui implique un examen en profondeur d’une situation ou d’un événement unique. Cette approche offre une méthode systématique d’observation des événements, de collecte de données, d’analyse de l’information et de communication des résultats.
  • L’apprentissage coopératif, peut aller d’un simple travail en binôme à des modes plus complexes tels que l’apprentissage par projet, l’apprentissage en puzzle, le questionnement guidé par les pairs et l’enseignement réciproque.
  • Avec l’analyse textuelle, les élèves apprennent à identifier comment les codes et les conventions de langues sont utilisés pour créer des types particuliers de représentations ciblant certains publics (les codes «techniques», «symboliques» et «narratifs» pour n’importe quel texte médiatique).
  • L’analyse contextuelle vise à aider les élèves à connaître des sujets tels que les systèmes de classification pour le cinéma, la télévision et les jeux vidéo, les liens entre la propriété et la concentration des médias et les questions de démocratie et de liberté d’expression.
  • Avec les réécritures, les élèves peuvent par exemple rassembler une série de documents visuels existants liés à la vie d’une personne et les utiliser comme point de départ pour préparer et réaliser un court documentaire sur cette personne.
  • En simulations, les élèves peuvent par exemple tenir le rôle d’une équipe de télévision produisant une émission pour les jeunes. La stratégie est discutée avec les étudiants comme un processus pédagogique.
  • Enfin, la production offre aux étudiants l’occasion de se plonger dans l’apprentissage par la découverte et la pratique. Par la production de textes médiatiques (audio, vidéo et/ou imprimé), les élèves peuvent découvrir la créativité et exprimer leurs propres opinions, idées et perspectives.

 

LE CIRCUIT DE L’INFORMATION

Le circuit de l’information suit différentes étapes :

1. Le fait
2. L’alerte ( un journaliste est informé par ses sources)
3. La vérification (plusieurs journalistes sont mobilisés, ils interrogent les organisations, les personnes ou les institutions concernées en se déplaçant sur place).
4. Une conférence de rédaction peut -être organisée par le média. Le rédacteur en chef réunit les chefs de service, on décide de déployer les journalistes sur le terrain et de traiter différents angles: les caractéristiques, les hypothèses, les précédents, les reportages, le récit de la journée…
5. Lors de la rédaction, le journaliste écrit son article ou son commentaire, puis les éditeurs relisent et corrigent, légendent les photos…
6. Quand l’information est recoupée, c’est le moment de la publication. Elle est publiée sous la forme d’un flash, d’une alerte ou d’une dépêche, selon l’importance de l’information.

A savoir: Avoir un scoop, c’est publier l’information en premier. Les autres médias pourront le reprendre mais en précisant d’où elle provient.

FAKE NEWS & COMPLOTISME

DÉFINITION

On désigne par théorie du complot une explication historique ou politique qui suppose l’existence d’une « vérité cachée ». Les fausses nouvelles complotistes répondent à 6 principales caractéristiques :

 

1. Elles impliquent un groupe secret très puissant et agissant dans l’ombre (reptiliens, Illuminati, Trilatérale, la NASA, Francs- Maçons, etc);

 

2. Ce groupe emploie un très grand nombre de gens (placés à des endroits stratégiques) dans tous les secteurs de la société — gouvernement, médias, police, universités, etc. — afin que le « secret » puisse rester… secret;

 

3. Elles s’opposent aux versions officielles, c’est-à-dire celles qui font consensus en science ou qui sont acceptées par la majorité dans les médias ou au gouvernement ;

 

4. Elles expliquent un événement par une seule cause. Par exemple, la guerre en Irak a eu lieu… parce qu’elle servait les intérêts des reptiliens !

 

5. Elles sont impossibles à réfuter. Peu importe la solidité des critiques qu’on apporte, leurs défenseurs vont toujours alléguer que ceux qui critiquent font partie du complot… ou sont naïfs.

 

6. On y fait toutes sortes d’amalgames. Par exemple : on sait que le gouvernement américain a menti pour la guerre en Irak, donc il a menti pour les missions lunaires. Les défenseurs de ces théories peuvent, au fil du temps, développer une connaissance encyclopédique des arguments favorisant ces théories même si aucun ne prouve leur validité.

 

 

ILLUSTRATION : UN SITE WEB COMPLOTISTE EN MACÉDOINE DU NORD

Natural News est un site d’extrême-droite situé en Macédoine du Nord connu pour propager des fausses informations alimentant diverses théories du complot.

 

Natural News fut notamment l’un des sites les plus prolifiques dans la diffusion d’une vidéo complotiste qui prétendait à tort qu’une sombre cabale d’élites utilisait le virus et un vaccin potentiel pour faire du profit et gagner du pouvoir. Cette vidéo de 26 minutes intitulée « Plandemic » mettait en scène une scientifique discréditée, Judy Mikovits, qui a déclaré que ses recherches sur les dommages causés par les vaccins avaient été enterrées. « Plandemic » a été mise en ligne le 4 mai dernier lorsque son auteur, Mikki Willis, l’a publiée sur les réseaux sociaux. Pendant trois jours, elle s’est accumulée sur les pages Facebook consacrées aux théories du complot et au mouvement anti-vaccins. Puis elle a basculé dans le courant dominant et a explosé.

 

Ainsi, selon le New York Times, “un peu plus d’une semaine après la sortie de « Plandemic », la vidéo avait été visionnée plus de huit millions de fois sur YouTube, Facebook, Twitter et Instagram” (source : lien).

FAKE NEWS & POLITIQUE

DÉFINITION

Les fausses informations à caractère politique sont “des allégations trompeuses, de nature à altérer la sincérité d’une élection, diffusées massivement de manière délibérée, artificielle ou automatisée par le biais d’un service de communication en ligne”. On parle de “campagne de désinformation” lorsque la diffusion massive de fake news traduit, en raison de son ampleur, la volonté de porter atteinte au bon déroulement d’un scrutin de manière à déstabiliser le régime en place, en surfant sur les peurs, le nationalisme et l’autoritarisme.

 

L’émergence de ces méthodes d’intrusion est intimement liée à la montée en puissance des plateformes numériques, qui permettent de diffuser des fausses nouvelles sur tel ou tel candidat avec une grande viralité, et avec un impact non négligeable sur l’opinion publique.

 

Toutes virtuelles qu’elles puissent paraître, les fake news à caractère politique ont des impacts bien réels. Elles ont notamment ces dernières années déstabilisé les processus électoraux de plusieurs pays.

 

C’est pourquoi les plateformes numériques, les Etats et la communauté internationale prennent des mesures de plus en plus sérieuses pour tenter de prévenir ces campagnes de désinformation, à travers, notamment, la régulation des réseaux sociaux et le renforcement de l’arsenal législatif.

 

 

ILLUSTRATION : LES USINES A FAKE NEWS EN MACEDOINE

Au cours de la campagne présidentielle américaine de 2016, la ville de Vélès, en Macédoine, est devenue “la capitale mondiale des fausses nouvelles”. En effet, sous l’influence de puissances étatiques, une centaine de jeunes macédoniens ont été enrôlés dans de véritables “usines à fake news”, dont l’objet était de déverser sur l’opinion publique américaine, via internet, un flot ininterrompu de fausses nouvelles pour faire gagner le candidat Donald Trump.

 

Ces jeunes ont gagné près de 10 000 euros par mois pour créer de faux comptes et inventer des articles de toutes pièces. L’une des fake news les plus courantes était de décrédibiliser la candidate démocrate, Hillary Clinton, en faisant circuler des rumeurs pour ternir son image. L’ allégation mensongère selon laquelle “Barack Obama a financé la campagne d’Hillary Clinton avec des fonds volés aux vétérans”, pilotée depuis Vélès, est ainsi devenue particulièrement virale aux Etats-Unis.

 

Le site web “The fake news machine : inside a town gearing up for 2020” documente et analyse les centaines de pages internet créées à Vélès et qui avaient pour principal objectif de contribuer par la manipulation de l’information à la victoire du candidat républicain.

 

Selon Xhelal Neziri, du “Centre pour le Journalisme d’Investigation en Macédoine” (Scoop), les activités des usines à fake news de Vélès étaient téléguidées par l’ancien parti nationaliste au pouvoir dans le pays. « Notre enquête montre que cette opération a été coordonnée par le précédent gouvernement. Une plateforme de jeunes qui publiait déjà des articles mensongers dans le domaine de la santé a été utilisée pour relayer des opinions politiques lors des élections parlementaires macédoniennes, puis lors de la présidentielle américaine » explique t-il (source : “Veles, capitale mondiale des fake news, RFI” – lien).

 

 

ILLUSTRATION : LES FAKE NEWS DÉSTABILISENT LES ÉLECTIONS EN UKRAINE

La campagne présidentielle ukrainienne de mars 2019, qui a consacré la victoire du comédien Volodymyr Zelensky – considéré comme pro-occidental – a été marquée par des campagnes de désinformation visant à discréditer ce candidat.

 

Ainsi, selon le média international DW (lien), “les fausses nouvelles en langue russe ont dévoré le paysage médiatique du pays” au cours de la période électorale. DW estime que les faux articles les plus populaires ont été diffusés sur des comptes facebook comptant jusqu’à 2 millions de membres.

 

Le 5 janvier, peu après que le comédien Volodymyr Zelensky ait annoncé sa candidature à la présidence, une page Facebook gérée par bbccn.co a ainsi publié une fake news pour ternir la réputation du candidat. L’article en question prétendait que le procureur de l’Ukraine, Yuriy Lutsenko, avait lancé des poursuites pénales contre Zelensky pour avoir planifié de renverser l’ordre constitutionnel. Cet article a suscité plus de 20 000 réactions en ligne. Il est cependant clair que cette rumeur relève d’une manipulation de l’information : aucune action en justice n’avait été entreprise contre le comédien.

Dans la même perspective, un faux site se présentant de façon trompeuse comme celui du candidat Zelensky a été identifié par les fact-checkers. Sur ce site, a notamment été publiée une déclaration inventée selon laquelle Zelensky souhaitait faire du russe la langue officielle de l’Ukraine. Une proposition qui ne figurait nullement dans les intentions du candidat.

 

L’article de DW “Is Ukraine’s presidential election threatened by fake news” revient plus en détail sur ces campagnes de désinformation qui ont tenté de prévenir la victoire du candidat issu de la société civile.

FAKE NEWS & PROPAGANDE

DÉFINITION

La propagande désigne les techniques de persuasion mises en œuvre pour propager une idéologie ou une doctrine et stimuler l’adoption de comportements au sein d’un public-cible. Au cours du XXe siècle, certains régimes ont institutionnalisé la propagande pour manipuler les masses.

 

Aujourd’hui, la propagande est notamment employée par les Etats pour museler la liberté de la presse. Ainsi, dans un rapport de 2017 (lien), l’UNESCO a exprimé son inquiétude concernant les attaques de plus en plus fréquentes dont faisaient l’objet les médias sous la forme de propagande et de fake news. Certains Etats utiliseraient ces techniques de désinformation pour “dénigrer, intimider et menacer les médias, notamment en affirmant que ces derniers représentent l’opposition ou qu’ils profèrent des mensonges”.

 

Cette propagande d’Etat à l’encontre des médias a notamment été observée dans la région des Balkans. Le Courrier des Balkans constate ainsi, que, dans plusieurs pays, “la manipulation des faits est utilisée comme une arme contre les journalistes indépendants, la société civile et les opposants politiques pour les discréditer”.

 

 

ILLUSTRATION : LES FAKES NEWS CONTRE LES JOURNALISTES EN MOLDAVIE

Dans le cadre des élections législatives de 2019 en Moldavie, des hauts fonctionnaires ont contribué à des campagnes de propagande et de désinformation ciblant les médias indépendants. Selon Le Courrier des Balkans ces fake news d’Etat ont touché 54 000 internautes, via des faux comptes sur facebook et instagram.

 

Parmi les cibles de ces fausses nouvelles figurait Cornelia Cozonac, Directrice du Centre de journalisme d’investigation de Moldavie (CIJM), qui traite des affaires de corruption. Des « trolls » ont cloné son compte et posté plusieurs messages en son nom, dans le but de discréditer son travail journalistique. De la même manière, des cyberattaques ont été lancées contre la plateforme web du CIJM, qui publie des enquêtes sur les différents candidats aux élections en Moldavie.

 

La campagne de propagande à même fait réagir la société Facebook, qui a publié un communiqué de presse. Celui-ci expliquait que “les personnes derrière les faux comptes ont essayé de cacher leur identité, mais nos procédures de contrôle ont permis de découvrir qu’une partie de cette activité de désinformation était liée à des employés du gouvernement moldave”.

FAKE NEWS & PANDEMIE

DÉFINITION

La propagation massive de fausses nouvelles qui ont concerné la pandémie du Covid-19 a été telle qu’un terme nouveau a émergé pour désigner ce phénomène de désinformation : “l’infodémie”.

L’infodémie fait ainsi référence à la vague d’informations trompeuses à propos du coronavirus qui a récemment déferlé sur les réseaux sociaux et les moteurs de recherche. Dans le contexte de la crise sanitaire, Tedros Adhanom Ghebreyesus, le Directeur général de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a ainsi déclaré que « les fausses nouvelles liées au Covid-19 se propagent plus rapidement et plus facilement que ce virus et sont tout aussi dangereuses ».

La pandémie s’est accompagnée d’informations fausses, malveillantes, relevant de théories complotistes. Les fake news suivantes ont été particulièrement virales au niveau mondial : Le virus causant le COVID-19 est une arme biologique créée par l’Homme ; Le gouvernement italien empêche les migrants de se faire tester pour le COVID-19 ; La pandémie de COVID-19 a été prédite lors d’une simulation.

 

Dans ce contexte, les médias, les Etats et la communauté internationale ont développé des organismes de fact-checking pour combattre la désinformation autour du virus, et rétablir les vérités scientifiques sur la maladie. Parmi ces opérateurs de la vérification des faits, nous pouvons par exemple citer : Le dispositif de l’Organisation Mondiale de la Santé ; La plateforme NewsGuard ; Le site UE VS Desinfo.

 

 

ILLUSTRATION : LES BALKANS A L’HEURE DU CORONAVIRUS

Les Balkans occidentaux ont été fortement touchés par les fausses informations liées au Covid-19. Une plateforme de Fact-Checking dédiée à vérification des faits s’est en particulier focalisée sur la déconstruction des fake news liées à la pandémie circulant dans la Région : RASKRIKAVANJE.RS.

 

Les exemples pour illustrer la propagation de l’infodémie dans les Balkans sont légion. En Bosnie, notamment, des discours de haine ont vu le jour sur internet. Ainsi, de retour d’un voyage en Italie et testée positive au coronavirus, une femme bosniaque âgée de 51 ans a été victime d’un véritable lynchage sur les réseaux sociaux après la publication d’informations erronées par plusieurs médias, qui racontaient qu’elle avait assisté à un concert et pris les transports en commun (ce qui était faux).

Selon Marija Vučić du site d’investigation Raskrikavanje, « ces publications irresponsables sont très dangereuses dans le contexte actuel, surtout pour les habitants de petites communes. Ils n’osent même pas sortir dans la rue car la population locale les tient responsables de la propagation de la maladie. Cela peut vraiment mettre en danger la sécurité de certains ».

 

Comme l’explique Le Courrier des Balkans, “les tabloïds de la Région ont emboîté le pas aux réseaux sociaux en répandant des informations non vérifiées sur la pandémie”.

 

Le tabloïd Serbe Alo ! (https://www.alo.rs/) a par exemple annoncé de façon erronée que le nombre de personnes infectées diminuait dans le monde. C’est faux : cette tendance n’a été observée que dans un petit nombre de pays. C’est ce type de contenu mensonger qui fait dire à Sandra Bašić Hrvatin, professeure à la Faculté des sciences humaines de Slovénie, que « l’avalanche de fausses informations sur les réseaux sociaux a instauré un climat de méfiance envers la science, les experts et les institutions. Les médias ne devraient pas céder au sensationnalisme, leur rôle devrait plutôt être d’expliquer la nature du virus et d’indiquer les mesures de prévention par le biais d’informations officielles et professionnelles ».

 

MÉCANISMES PSYCHOLOGIQUES ET SOCIAUX DE L’INFODEMIE

Au cours du développement de la pandémie du Covid-19, le monde a vu la montée des théories de conspiration, des fausses nouvelles et des doutes sur la version officielle de l’origine et de la propagation de la maladie, ainsi que sur sa gravité. Une proportion importante des populations, dans les pays gravement touchés comme dans ceux qui le sont moins, a été prise au piège de diverses théories du complot et canulars. Cela n’est pas surprenant étant donné que la maladie n’est pas seulement associée à l’expertise médicale, mais qu’elle déclenche également la dynamique sociale et psychologique associée aux conspirations.

 

Ces théories se développent lorsque les gens tentent de donner un sens à un événement qui, autrement, en semble dénué. Il s’agit d’expliquer ces événements par le biais des théories conspirationnistes.

 

Cette tendance est particulièrement prononcée lorsqu’il existe une dissonance cognitive importante entre la cause et l’effet. Par exemple une pandémie déclenchée par l’infection aléatoire de plusieurs humains par des animaux qui a entraîné des millions de cas et près d’un demi-million de décès dans le monde à la mi-juin 2020.

 

Les théories du complot mettent toujours l’accent sur un complot malveillant souvent mené par un petit groupe de personnes contre le monde ou une nation, ce qui a pour effet de désarmer les individus tout en les dégageant de leur responsabilité.

 

Les conspirations se développent particulièrement lorsque les événements touchent les gens personnellement, comme la pandémie, et lorsque la confiance dans les connaissances établies et dans ceux qui fournissent ces connaissances, comme l’État, la science et les médias, est faible.

FAKE NEWS & ENVIRONNEMENT

DÉFINITION

Le thème de l’environnement est particulièrement ciblé par les fausses nouvelles. Ces fake news sont le plus souvent montées de toutes pièces par le mouvement “climato-sceptique”. Cette mouvance négationniste réfute la réalité du réchauffement climatique, pourtant démontrée depuis plus de 20 ans par la communauté scientifique internationale.

 

Ainsi, concernant l’écologie, les faits scientifiques demeurent aujourd’hui noyés dans un flot ininterrompu de fausses nouvelles et d’approximations. Le propagation virale de ces fake news au sujet de l’environnement est manifeste : on estime que la moitié des informations partagées sur la toile à ce sujet sont fausses, trompeuses ou qu’elles ne reposent sur aucune preuve (source : Stéphane Foucart, ”L’avenir du climat : enquête sur les climato-sceptiques”, 2015).

 

Derrière les campagnes de désinformation liées à l’environnement se trouvent généralement les lobbies industriels ou des Etats qui les défendent. En effet, les entreprises prédominantes (pétrole, automobile, agroalimentaire, ect..) rechignent à la transition écologique, perçue comme un frein à la croissance. Ces forces industrielles influencent alors le débat public, en parant bien souvent leurs discours climato-sceptiques des habits de la science. Organisées en cercles d’influence, elles diffusent dans les médias et auprès des institutions des rapports, des notes, des graphiques qui tendent à remettre en cause l’origine humaine comme l’importance de la crise écologique. Ces théories, diffusées dans l’intention de manipuler, trouvent un écho dans l’opinion, qui ne dispose souvent que d’une faible culture scientifique.

 

Ce courant climato-sceptique trouve des représentants parmi les dirigeants les plus puissants du monde. Ainsi, le président Russe Vladimir Poutine a déclaré que “rien ne prouve que l’activité humaine soit à l’origine du dérèglement climatique”. Son homologue américain Donald Trump va encore plus loin puisque, selon lui, le réchauffement climatique serait une « mascarade ».

 

Face à cette manipulation de l’information, le constat dressé par l’activiste suédoise Greta Thunberg est implacable : “le conspirationnisme, le déni des faits, les mensonges, la haine des enfants qui agissent sur des fondements scientifiques : tout cela parce que certains adultes, terrifiés par le changement, ne veulent absolument pas parler de la crise écologique”.

 

ILLUSTRATION : LES FAKE NEWS RUSSES AUTOUR DE GRETA THUNBERG

La Russie et les médias pro-Kremlin diffusent des allégations mensongères visant à discréditer l’une des figures de proue du mouvement écologique : l’activiste suédoise Greta Thunberg.

 

Ainsi, Argumenty i fakty, un tabloïd russe populaire, a propagé une théorie conspirationniste et antisémite à propos de l’activiste suédoise, affirmant que “les activités de Thunberg sont financées et soutenues par les fondations Open Society de George Soros” mais aussi que “le yacht sans émissions qui a mené Thunberg à New York a été construit sous l’ordre d’un des représentants du clan Rothschild« . Le site web RadioFreeEurope, dans son article “The Russian Bear Is Spooked By Greta The Eco-Activist” (lien), revient plus en détail sur ces théories du complot qui visent la jeune icône du mouvement écologiste.

 

MÉCANISME DES FAKE NEWS CLIMATO-SCEPTIQUES

Les climatosceptiques remettent en cause l’existence, les causes et les conséquences du réchauffement climatique. S’ils sont accusés de diffuser des fake news, ils continuent d’imprégner le débat public (médias, politique, éducation…) et influencent le traitement de la crise écologique. Ils diffusent plusieurs types de fake news sur le thème de l’environnement :

  1. Celles visant à disqualifier la crédibilité d’un interlocuteur ou d’un média pro-environnement
  2. Celles qui tentent de désinformer, en cachant ou interprétant le contexte d’un événement lié au climat
  3. Celles consistant à cadrer un fait de manière réductrice. Il s’agit par exemple de parler de la crise environnementale en ne prenant qu’un critère, comme le réchauffement climatique, sans parler de la biodiversité et des interdépendances (océans, atmosphère, biodiversité, climat, eau…).